Radical Candor — en toute franchise

Fleur Saillofest
4 min readDec 2, 2022

Jeudi 10 novembre, j’ai été invitée à parler à la conférence Agile Tour Aix-Marseille où j’ai proposé un atelier autour de Radical Candor.

Qu’est-ce que Radical Candor?

Dans le monde du travail, on pense souvent qu’être professionnel signifie mettre de côté ses émotions, séparer sa vie personnelle et professionnelle.

De la même manière, nous avons souvent peur de blesser. Dire les choses qui ne vont pas est souvent vu comme dur ou “méchant”. Il vaut mieux se taire si tu n’as rien de gentil à dire.

Développé par Kim Scott, Radical Candor est un cadre de management qui donne des clés pour créer un environnement sincère et ouvert aux feedbacks pour une meilleure collaboration et une entreprise plus performante.

Pour cela Radical Candor propose de travailler sur 2 axes :

  • L’attention personnelle (Care personally)
  • La remise en question frontale (Challenge directly)

et propose 4 lieux selon ces 2 axes.

Avoir de l’attention personnelle veut dire avoir des relations humaines dans toute leur ampleur. Se préoccuper de comment vont les personnes avec qui on travaille (et pas seulement “salut ça va?”), savoir ce qui les motive, les intéresse, les préoccupe. Tisser de la confiance avec ses collègues (une bonne relation ne suffit pas à la confiance).

“Ecoutez les gens, ce n’est pas du baby sitting, ça s’appelle gérer c’est votre boulot” — Sheryl Sandberg, manager de Kim Scott chez Google

Pour une pleine sincérité bienveillante, l’attention personnelle doit être accompagnée de remise en question frontale. C’est-à-dire informer même des choses difficiles, transmettre tous les messages, permettre l’amélioration continue en disant ce qui ne va pas, faire souvent des compliments spécifiques, personnalisés, contextualisés. Être frontal et franc, ça secoue, c’est difficile. C’est important de ne pas le nier et de ne pas l’éviter.

Si on remet en question sans avoir fait preuve d’attention personnelle, cela peut être perçu comme de l’agressivité insupportable (obnoxious aggression).

Exemples:

  • Un Scrum Master arrive dans une nouvelle équipe et critique comment se passe le daily “ça dure plus de 15 minutes”, “Il y a trop de tickets en cours” sans connaître le contexte et les personnes
  • Un chef complimente quelqu’un pour un travail devant tout le monde alors que ce travail a été fait par toute une équipe

L’intention ici n’est pas forcément mauvaise mais nous n’avons pas pris le temps de faire preuve d’attention pour l’autre. Radical Candor nous invite alors à monter sur cet axe.

Quand la réaction en face est difficile, nous allons souvent aller vers le silence et arrêter la remise en question. On se retrouve alors dans le double jeu manipulateur (manipulative insincerity).

Exemples :

  • Une équipe a un problème avec le travail d’un de ces membres, tout le monde en parle quand il n’est pas là mais personne n’ose aborder le problème avec lui
  • Un chef ne remet jamais en question son équipe et la défend systématiquement devant toutes les critiques sans se préoccuper de l’amélioration de son équipe ni de ses relations avec les autres
  • Dire “bonne présentation” à un collègue alors qu’on pense qu’il y a des améliorations à apporter

Enfin, si on fait attention aux autres mais sans dire les choses, on tombe dans l’empathie dévastatrice (ruinous empathy).

Exemples :

  • Un manager ne dit pas au fur et à mesure ce qui ne va pas à son managé pour qu’il s’améliore et lui annonce qu’il n’est pas augmenté à son bilan annuel
  • Une personne de l’équipe vient voir le Scrum Master pour se plaindre d’une situation, le Scrum Master l’écoute, va dans son sens mais ne lui dit pas ce qu’elle pourrait changer dans son comportement pour s’en sortir

L’empathie dévastatrice est parfois confondue avec de la bienveillance. Laisser les choses en l’état, ne pas dire pour ne pas blesser peut avoir des conséquences bien pire pour les personnes concernées.

J’aime beaucoup le cadre proposé car Radical Candor car cela me donne des axes de réflexion sur ma posture au quotidien. Pourquoi suis-je perçue comme dure? Comment ne pas tomber dans la fausse bienveillance? Comment accompagner des managers, des équipes à créer un environnement de franchise?

J’attire votre attention sur le fait qu’il n’est pas question de ranger des gens dans des cases. Nous passons tous par les 4 côtés du cadran. C’est un outil qui invite à l’introspection.

Kim Scott propose de se pencher sur 4 questions d’introspection :

  • Quand ai-je reçu de la sincérité bienveillante ? Par exemple, quel feedback ai-je reçu qui a piqué et m’a aidé sur le long terme?
  • Quand ai-je pu faire preuve d’agressivité insupportable? Par exemple, quand ai-je fait une critique alors que j’étais en colère sans me préoccuper du contexte?
  • Quand ai-je pu tomber dans le double jeu manipulateur? Par exemple, est-ce que j’ai dit à quelqu’un que son travail était bien sans le penser? Ou critiquer un collègue auprès d’autres sans lui dire?
  • Quand ai-je pu faire preuve d’empathie dévastatrice? Par exemple, quand ai-je évité de dire quelque chose à quelqu’un et la situation a empiré car je me suis tu?

Pour aller plus loin, quelques ressources :

  • Le site de radical candor qui contient pas mal de ressources, notamment un blog fourni.
  • Le livre Radical Candor, en français (En toute Franchise) ou si vous êtes à l’aise en anglais, la seconde édition contient un chapitre de plus avec des exemples, des exercices et cas concrets

Et voilà ma présentation à l’Agile Tour Aix-Marseille :

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